C’est en mai 2014 que je suis arrivé en Sierra Leone ; je suis tout de suite tombé sous le charme de son beau paysage avec ses palmiers, sa magnifique faune et flore qui me semblaient familiers. Mon arrivée a coïncidée avec la saison de mangues et j’en étais ravi. Dans l’archidiocèse de Freetown, j’ai découvert une pratique intéressante des prêtres qui se rencontraient chaque dernier dimanche du mois pour un temps convivial dans l’une ou l’autre des paroisses. Cette pratique fut interrompue au moment ou la fièvre Ébola battait son plein et que le gouvernement avait passé la loi de restriction de mouvement et de rassemblement publique.
Ne croyez pas en rumeurs
Le 6 Avril 2014, nous avons eu le pèlerinage annuel du temps de Carême. Environ cinq mille personnes y ont participées marchant près de cinq kilomètres et méditant sur les différentes stations du Chemin de Croix dirigé par l’archevêque. C’est aussi lui qui présida à l’eucharistie marquant la clôture de ce pèlerinage. À la fin de la messe, le ministère de la santé a fait faire une annonce concernant l’épidémie d’Ébola. Le message était plein d’espoir, il annonçait que le pays n’était pas atteint de la maladie et de ce fait encourageait la population à ne pas croire aux rumeurs qui pouvaient circuler puis interdisait la consommation de viande de brousse. Malgré les encouragements du gouvernement qui disait à la population de ne rien craindre par rapport a Ébola, des personnes rependaient des rumeurs de cas dans certaines régions de la Sierra Leone.
Le virus se propagé très vite
Vers la fin du mois de Mai, des cas d’Ébola ont déclarés à l’est du pays, pourtant la Sierra Leone était mal équipée pour faire face à cette situation qui était étrange à tous. Le personnel de santé était informé qu’il fallait mettre les personnes malades en quarantaine, mais il n’y avait pas d’infrastructures nécessaires pour parer à cette situation. Le virus s’est donc rapidement propagé dans les mois de Juillet et Aout dans les régions de l’Est et du Sud du pays. En ce temps la, j’ai voulu rende visite à ami prêtre, le père Georges du Diocèse de Kenema, pour l’aider en ce temps de souffrance. Mais je pensais aussi aux implications et complications de cette visite. En ce moment là aussi, il y avait des cas déclarés dans les autres régions mais le Centre d’Isolation n’était qu’à l’Est et les patients devaient y être transportés par ambulances. Au cours du trajet, on administrait beaucoup de chloroquines aux patients dans l’ambulance et certains arrivèrent soit en mauvais état ou d’autres y arrivèrent mort.
Comme des prisons sans nourriture
En Septembre, la maladie s’est propagée dans tout le pays et Freetown ne fessait pas exception. Quand un individu était dépisté Ébola positif, toute sa famille ainsi que toutes les personnes qui ont été en contact avec lui étaient mises en quarantaine. Les personnes en quarantaine avaient interdiction de se mélanger aux autres. Il y eu des cas où tout un village entier a été mis en quarantaine. Dans ce cas, ses habitants ne sortent sous aucun prétexte. Lorsqu’une ou plusieurs personnes étaient mises en quarantaine, le gouvernement par le biais du Programme Alimentaire Mondial [PAM] devait fournir assez de nourriture pour eux. Malheureusement ça n’a toujours pas été le cas. Les domiciles mis en quarantaines étaient gardés par des éléments de l’armée et de la Police. Il m’a souvent été rapporté que la plupart des maisons mises en quarantaine n’avaient pas reçues de nourriture ni d’eau. C’était comme des prisons sans nourriture. Ayant pour devise : « Être toujours prêt à répondre aux besoins du temps présent », je ne pouvais résister à mon désir de faire quelque chose pour ces personnes en quarantaine.
Don du salaire d’un mois
L’un de notre confère, P. David était en vacances au Ghana. Parti dans le mois de Juin il espérait revenir en Septembre. Malheureusement il n’a pas pu revenir à la date prévue en raison de l’interdiction des vols. Le P. Valery, du Togo, et moi avons donc échangés sur la réponse que nous devrions donner à cette situation. Nous nous sommes alors convenus que nous utiliserions notre allocation mensuelle pour procurer au moins un peu d’eau potable aux personnes en difficultés. Nous avons donc commencé par donner de l’eau minérale en sachet, communément appelée ‘pure water’ (ndlr). Lorsque nous portions notre aide, nous découvrions des situations plus bouleversantes que nous ne l’imaginions ; alors, nous nous sommes résolus à leur acheter quelques sacs de riz. Un ami en Inde, membre du groupe ‘Jesus Youth’, se porta volontaire pour faire don de plus d’un mois de son salaire pour nourrir les personnes en quarantaine qui n’avaient pas à manger. Cette proposition m’a inspirée à faire des demandes à nos amis partout dans le monde grâce à Facebook et cela a été d’un grand succès.
Les entités SMA ont répondu favorablement à notre appel
L’entité Golfe de Guinée avait fait appel à tous ses membres pour nous porter son aide que nous avons reçus par l’entremise de Rome. Nous avons aussi envoyé des demandes à toutes les autres entités de la Société des Missions Africaines qui ont répondues favorablement à notre appel. Nous voudrions leur témoigner de notre reconnaisse à travers ces lignes. Ce sont les encouragements de la SMA, des sœurs NDA, des Amis de la SMA, des membres du groupe ‘Jesus Youth’, des paroisses, de nos amis et des membres de nos familles qui nous ont permis de faire ce que nous avons pu au cours de cette période de crise.
Deux malades transporté dans une brouette
Dans notre région et alentour, nous suivions l’évolution de l’épidémie avec intérêt. Nous étions toujours prêts à combler tout retard de nourriture dans les lieux mis en quarantaine. Lorsque nous allions avec la nourriture dans ces endroits, nous trouvions des personnes malades dans des maisons. Jusqu’à la fin du mois de Novembre 2014, la gestion de l’épidémie n’était pas encore organisée. Il n’y avait toujours pas assez d’ambulances pour répondre aux besoins. Ceci nous conduisit à une autre étape de notre réponse : transporter les patients vers les centres d’Ébola. Pour cette étape, nous gardions chaque fois dans notre véhicule un récipient de solution de concentré de chlore à 0,5 %. Le manque d’ambulance avait une fois provoqué à Campel Ville, un village, le transport vers le Centre Ébola de deux patients dans une brouette. Les ayant rencontré en chemin, nous avons accepté de les prendre après les avoir désinfectés eux et tous ceux qui étaient en leur compagnie poussant la brouette. Ils ont été désinfectés avec notre solution de concentré de chlore à 0,5 %.
Les patients refusé faute d’espace
Les Centres d’Ébola ont souvent refusés des patients par manque de place. Nous en avons souvent fait l’expérience nous même avec certains patients que nous transportions vers ces centres. Nous sommes souvent allé d’un centre à un autre cherchant de la place pour que les personnes que nous avions avec nous soient prises en charge. Un jour, nous avions recueilli au bord de la route et transporté vers un Centre d’Ébola quatre personnes de la même famille : le père, la mère, la fille et fils qui avaient été chassé de leur village par les autres villageois. Nous avons fait le tour de tous les quatre centres d’Ébola qui étaient disponibles dans notre district mais nous n’avons malheureusement pas pu être accueillis avec les patients que nous transportions. Ceci, par ce qu’il n’y avait plus de place disponible dans tous les centres. Impuissant devant une telle situation, nous n’avions de choix que de laisser ces patients dehors devant l’hôpital, certainement avec un cœur meurtri. Mais plus tard, nous avons reçus l’information qu’ils ont été pris en charge après notre départ. A l’exception du père, qui désormais fait parti du cercle très fermé des survivants d’Ébola, tous les trois autres n’ont pas survécus à l’épidémie..
Le Centre equipé avec cinq lits
Au fil du temps, nous avons établis des liens avec le Centre de soins d’Ébola le plus proche. Il nous était désormais possible de vérifier le nombre de lits disponibles dans le centre en appelant le responsable. Ceci rendait plus facile la prise en charge des patients. Et nous, nous étions heureux de fournir de la nourriture et de l’eau à ce centre chaque fois qu’il y avait retard dans la livraison des produits alimentaires. Nous avons également équipé ce centre de cinq lits.
Un orphelinat pour les enfants victimes d’Ébola
Un jour dans le centre, nous avons fait la rencontre d’une fillette d’environ quatre ans, toute malade qui avait perdu ses parents à cause du virus d’Ébola. Heureusement, elle était Ébola négative ; mais les agents de santé du centre ne savaient pas à qui la rendre, elle n’avait plus de parents pour la recueillir. Même les membres de la famille au sens large n’étaient disposés à la prendre, nous nous sommes donc porté volontaires pour la pendre chez nous où elle vit actuellement. Nous avons même le projet de créer un orphelinat des enfants dont les parents ont été victimes d’Ébola.
Les jeunes se sont offert
Les jeunes, de leur propre initiative sont venus un jour nous voir pour savoir ce qu’ils pouvaient faire dans cette lutte contre Ébola. Nous nous sommes donc adressé au Programme de Développement de la Communauté de Kwama qui maintenant donne des séminaires aux jeunes et les encourage à aller dans 34 villages pour faire du porte à porte afin de sensibiliser sur le virus d’Ébola. Actuellement 103 jeunes participent à ce programme de sensibilisation.
Un centre Communautaire de soins
Dans le but de répondre au besoin de manque de lits pour les patients dans les centres d’Ébola, nous avons crée un Centre Communautaire de prise en Charge des patients d’Ébola en collaboration avec le ‘Shepherd’s Hospice’. Pour cette initiative nous avons vraiment bénéficiés du soutien de l’Archevêque, de Caritas-Freetown, des Salésiens, des Xavériens et bien sûr de la communauté locale.
Vers d’autres problèmes de santé
Notre centre a tourné avec 20 infirmières et 34 volontaires du monde de la santé. Nous avons travaillé pendant une courte période d’un mois. Puisque le nombre de patients diminuaient, les centres de lutte contre Ébola se désengorgeaient, il n’était donc plus nécessaire que nous ayons un centre de plus. Nous avons donc décidé de fermer le notre mais certain de vouloir l’organiser pour d’autres problèmes de santé.
Nous avons choisi les plus abandonnés
Maintenant avec l’aide du chef de la communauté monsieur Clément Kanu, nous avons ouvert un orphelinat destiné aux enfants dont les parents ont été victimes d’Ébola. Même si nous sommes conscients qu’il y a d’autres enfants qui ont besoin d’attention, nous avons choisis les plus abandonnés. Et parmi eux si certains ont des membres de leur famille qui veulent s’occuper d’eux, nous les encourageons à le faire. Avec certaines organisations, nous essayons de leurs fournir de la nourriture et autres besoins nécessaires. Actuellement, nous avons huit enfants âgés de cinq à treize ans dans notre orphelinat.
Il est maintenant temps pour nous de penser à l’après Ébola
Père Francis Patrickson, sma
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